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D’indécise à éditrice : un parcours de surprise en surprise

Chroniques | 2022-11-14
Lucie Demers, c.o.
Par Lucie Demers, c.o.

Je me rappelle précisément l’instant où j’ai décidé de devenir conseillère d’orientation. (Ironiquement, cet instant se rapproche du fameux « éclair de génie » tant espéré par de jeunes indécis!)

Comme bien des gens, j’ai vécu un long processus d’orientation où j’ai eu souvent l’impression d’avoir enfin trouvé ma voie. Mine de rien, chaque fausse bonne idée me conduisait à un projet qui me ressemblait davantage (l’éclair n’était donc pas si magique que ça!).

Un jour, j’ai fait une prise de conscience qui s’est avérée très significative dans ma vie de cégépienne en quête identitaire. Jusque-là, je me mettais beaucoup de pression à tendre vers un idéal qui ne me correspondait pas. Alors que tout le monde semblait à l’aise en groupe et enchainait les activités sociales, je me sentais mal d’aimer être seule. De lecture en lecture, j’ai appris le mot « introversion », et tout a basculé. J’étais introvertie! Un simple mot m’avait démontré toute la valeur de la connaissance de soi. Je me sentais si bien que j’ai souhaité à tout le monde de bien se connaitre, tout d’un coup. Je venais d’avoir la piqûre pour l’orientation, sans le savoir.

En effet, je n’ai pas pensé à devenir conseillère d’orientation tout de suite. J’ai voulu devenir enseignante de français, car j’avais de la facilité avec les mots et surtout, je voyais une occasion d’éveiller quotidiennement les élèves à la connaissance de soi. L’objectif était louable, mais le moyen, un peu tiré par les cheveux. J’ai aussi considéré la philosophie pour enfants, qui me semblait plus près de mon objectif, mais si loin en même temps…

Puis, est arrivé ce fameux éclair de génie, la veille du premier jour de ma dernière session de cégep, alors que j’angoissais à propos du 1er mars. À force de remuer mes pensées, le mot « orientation » m’est venu à l’esprit. Orientation, comme dans « connaissance de soi » (bien sûr!), « quête de sens » et « besoin d’accompagnement ». C’était pour moi!

Je n’ai plus jamais douté de mon choix. Durant tout mon parcours universitaire, ma seule crainte était de vivre plusieurs années d’instabilité, à enchainer des contrats, avant de trouver un emploi à long terme dans mon domaine.

C’est dans cette optique qu’en 2012, j’ai envoyé ma candidature chez Septembre éditeur pour remplacer un congé de maternité de 8 mois. Le poste consistait principalement à m’occuper du service à la clientèle et à participer aux activités de promotion de l’entreprise. Je n’ai jamais su pourquoi j’avais obtenu le poste : je n’avais presque rien vendu de ma vie! Je n’avais même jamais travaillé pour une entreprise privée, avec des cartes d’affaires, des produits à vendre et un patron que j’appelais par son prénom. Mystère!

Malgré tout, le 2 mai 2012, j’intégrais une maison d’édition axée sur l’orientation et le monde du travail. J’étais très impressionnée par tout : les auteurs chevronnés, les trois décennies de publications, l’équipe expérimentée… Petit à petit, je m’intéressais aux nouveautés. J’essayais de comprendre la mécanique d’une maison d’édition. Je donnais mon avis sur certains projets, à la demande de mon patron. À la fin de mon contrat, on m’a proposé de joindre l’équipe permanente en tant que chargée de projets. Je n’en croyais pas mes oreilles!

Je me souviendrai toujours du premier projet qu’on m’a confié : le nouveau manuscrit d’Isabelle Falardeau, qui est plus tard devenu L’Orient-Expert. J’étais à la fois honorée et terrorisée à l’idée de décevoir cette auteure que j’admirais. Au contraire : durant tous nos échanges, elle a accueilli mes commentaires avec ouverture et bienveillance. J’ai également côtoyé des professionnels avec qui je n’aurais jamais pensé travailler comme c.o. : une graphiste, une réviseure linguistique, une infographiste, un imprimeur, même un idéateur! J’ai tout vu de A à Z, de la première ligne du document Word au livre imprimé. J’en avais plein la vue!

Depuis ce temps, je suis toujours motivée par l’idée d’aider un auteur à réaliser son projet, malgré les nombreuses émotions qu’impose le processus. De plus, j’ai la conviction d’aider les lecteurs indirectement. Même si je ne rencontre jamais de clients en tant que c.o., j’ai l’impression d’aider des gens de façon directe et indirecte, tout en voyant de magnifiques projets se déployer sous mes yeux. C’est ainsi que de 2013 à 2017, j’ai eu la chance de collaborer à des projets de toutes sortes : livres, fascicules, outils numériques, dépliants, jeux, etc. J’ai beaucoup appris sur les rouages de l’édition.

En 2017, un changement de propriétaire a donné lieu à une réorganisation du travail. J’ai alors formé une équipe de codirection avec la nouvelle directrice générale. Moi, j’étais directrice éditoriale. Je pouvais ainsi continuer de faire ce que j’aimais (mener à bien des projets) tout en goûtant à la gestion d’une entreprise. Moi qui ne m’étais jamais vue comme une entrepreneure, je me suis surprise à apprécier différents aspects associés à ce rôle : définition de l’image de marque, élaboration (et application) d’un plan stratégique, veille d’opportunités, etc.

Au printemps 2022, le poste de directrice générale s’est libéré. Au terme d’un long processus, je me suis sentie à l’aise de relever ce défi. Sans prétention, mais avec la conviction que la somme de mes expériences pouvait apporter quelque chose à la maison d’édition. Jusqu’à maintenant, je me découvre des réflexes et des aptitudes que j’ignorais. Il me reste une panoplie de compétences à acquérir et je sais que je ferai des erreurs (c’est déjà fait!). Cela dit, plus que jamais, j’ai l’impression d’aider les gens, directement et indirectement.

Si mon parcours peut motiver quelques c.o. à oser sortir de leur zone de confort pour relever des défis, mon but sera atteint! Entre-temps, j’en connais plusieurs qui l’ont déjà fait et qui sont inspirants pour toute notre communauté. Prenons le temps de souligner leur contribution, leur implication et leur créativité afin de faire rayonner notre belle profession!

Bonne Semaine québécoise de l’orientation !
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